Comment mesurer le bien-être territorial ?

Les démarches d'analyse du bien-être territorial s’inscrivent dans la lignée des initiatives portées localement par des collectivités et leurs partenaires académiques depuis une vingtaine d’années pour renouveler les indicateurs de développement territorial.

Ces expérimentations se donnent pour objectif de produire des outils de mesure du bien-être territorial, avec une volonté de mobiliser les parties prenantes dont les habitant·es. Elles interrogent ce qui fait qu’on se sent bien sur un territoire à l’échelle d’un quartier, d’une commune, d’un bassin de vie. Florence Jany-Catrice

Contexte

L’Agence de Développement et d’Urbanisme de Lille Métropole porte la démarche bien-être territorial, avec ses partenaires la Région Hauts-de-France, la Métropole Européenne de Lille, le Centre Ressource du Développement Durable (CERDD), l’Université de Lille et l’Institut pour la recherche de la Caisse des Dépôts. 

La démarche s’inscrit dans la lignée des initiatives de renouvellement des indicateurs de développement territorial. Le contexte d’urgence climatique et de multiplication de crises aux conséquences économiques, sociales et démocratiques interroge sur la façon de « prendre soin » des territoires et de leurs habitants. Cette période apparaît décisive pour se poser la question de ce qui compte et de ce que l’on souhaite préserver aujourd’hui, tout en prenant en considération le bien-être des générations futures.    

Qu’est-ce qui fait que l’on se sent bien sur son territoire ? Comment en rendre compte ? Comment impliquer les habitants et acteurs du territoire dans cette définition ?

La démarche bien-être territorial vise à proposer une méthode participative pour que les communes définissent par elles-mêmes leurs outils de mesure du bien-être territorial en associant leurs parties prenantes (dont les habitants), avec plusieurs objectifs :

• Composer une vision partagée du bien-être territorial ;
• Proposer des indicateurs de mesure qui fasse sens ;
• Insuffler une dynamique collective autour du projet de territoire.

Les résultats de la démarche sont accessibles sur le site de l’ADULM.

Points de vue

Pour co-construire une vision partagée du bien-être territorial qui ne se réduise pas aux préférences individuelles, l’ADULM considère qu’il est important d’associer les habitants et acteurs du territoire afin de partager leur expertise d’usage du territoire et leurs points de vue sur ce qui compte.

Le bien-être est un concept multidimensionnel, proche de la notion de « qualité de la vie », et se trouve au croisement de déterminants objectifs (comme la situation d’emploi, ou l’accès aux équipements) et de déterminants subjectifs (ce à quoi on aspire). La dimension territoriale est essentielle car elle a un impact sur les conditions et le cadre de vie, et car l’attachement au territoire influence le bien-être ressenti. Il est donc important de prendre en compte les spécificités locales.

L’ADULM a construit un référentiel qui présente l’ensemble des dimensions qui peuvent contribuer au bien-être territorial, et sert de grille de lecture pour appréhender les contributions des habitants. Il est structuré à travers trois leviers :

• L’attachement au territoire ;
• La communauté de vie (qui renvoie aux relations sociales, à l’engagement et à la vie en société) ;
• Le territoire de vie (qui renvoie notamment aux aménités du territoire, leur qualité et leur accessibilité).

Par ailleurs, le bien-être territorial peut être appréhendé différemment selon les profils et parcours de vie des personnes, qui influencent leurs aspirations. Les dimensions prioritaires du bien-être peuvent aussi varier selon l’échelle à laquelle on se place (quartier, commune, métropole). Enfin, l’ADULM considère que les enjeux environnementaux doivent être pris en considération pour préserver le vivant non humain et ne pas compromettre le bien-être des générations futures.

Éclairages

Portée et limites

L’ADULM a travaillé avec deux communes (Sailly-lez-Lannoy et Lomme) et avec le Conseil de Développement de la MEL, afin d’alimenter la démarche et de répondre aux besoins identifiés par ces partenaires. Ces expérimentations ont mobilisé des habitants lors de plusieurs ateliers de co-production. En créant un espace de dialogue entre habitants et techniciens ou élus, elles ont contribué à la dynamique de participation citoyenne au sein des communes. Elles ont aussi permis de décliner localement une définition du bien-être territorial et d’identifier des indicateurs pour en rendre compte, pouvant alimenter de futurs travaux.

La démarche nourrit d’autres travaux de l’ADULM : le référentiel de bien-être territorial a par exemple été utilisé pour structurer le bilan du SCOT de Lille Métropole (document d’urbanisme définissant les grandes orientations de développement du territoire). Enfin, la démarche peut contribuer au récit métropolitain sur le bien-vivre ensemble et la qualité de vie, sur l’hospitalité et l’attractivité du territoire. Animer des espaces de débats sur ce qui fait que l’on se sent bien apporte une meilleure connaissance des besoins et des aspirations des habitants ; en ce sens, cela peut être un levier de résilience.

Certaines limites de la démarche peuvent être identifiées :

• Limite liée à la participation citoyenne : comment assurer une meilleure diversité et représentativité des habitants mobilisés ?
• Limite liée à la disponibilité des données statistiques : certaines dimensions essentielles du bien-être (relations sociales, composantes immatérielles) ne peuvent être mesurées à travers les indicateurs existants.

Ressources liées